Adoration commence sur une scène qui à elle seul pourrait résumer tous le film, un enfant (Thomas Gioria, magistral) seul dans les bois, tombe sur un oiseau coincé dans du un filet, dans un elan de gentillesse, il va sauver l‘animal, tenter d’en prendre soin, mais après une vingtaine de minute de film, l’oiseau sera retrouvé mort.

Cette analogie, on la retrouve constamment dans le film, l’histoire de Paul, vivant aux alentours de l’hôpital psychiatrique où travaille sa mère, tombant éperdument amoureux de la jeune Gloria (Fantine Harduin, magistrale également), cette dernière, patiente de l’hôpital, convainc le jeune garçon que sa présence ici relève du complot, et qu’il doit l’aider à fuir. Commence alors une fuite à travers la Belgique pour les deux jeunes amants, mais malgré tous les efforts de Paul, il ne pourra pas sauver Gloria de sa folie, comme il n’a pu sauver l’oiseau de la mort.

Avec ce film, Du Welz fait la version enfantine de La Balade Sauvage, le pitch étant plus ou moins le même avec des personnages âgés d’une dizaine d’années de moins, mais en conservant la même violence que le film original, accentué par le décalage entre le jeune âge de nos héros, et la violence des situations dans laquelle il se trouvent. Car oui, dans Adoration, Paul va se retrouver confronté à la folie destructrice de Gloria, à laquelle il est prêt à dédié tout son amour, et par la même, toute son énergie, faiblissant au fur et à mesure du film jusqu’à devenir l’ombre de lui-même, un être vide, pousser par une force supérieure, par une adoration pour cette jeune femme. Mais la comparaison avec Malick ne s’arrête pas ici, impossible ne pas penser au cinéaste texan vu les nombreux plans sur la nature qu’offre le film.

Avec Gloria, va se faire pour Paul la découverte du sexe, et ici les influences sont à aller chercher du côté de la suède, avec le film Morse, qui mettait également en scène une histoire semblable, ou un jeune garçon tombait amoureux de sa nouvelle voisine qui s’avérait être une vampire. Ceux qui ont vu ce petit chef d’œuvre se rappelleront de l’étrange tension sexuelle qui en émanait, atteignant son paroxysme dans une scène de caresses sous les draps, tout en délicatesse. Chez Du Welz, tout est bien plus frontal, explicite, et pourtant, c’est une sensation similaire qui apparaît, une étrange impression de voyeurisme, aussi malsaine que fascinante. Si sur ce point Morse est plus fin qu’adoration, il n’empêche ce dernier prend des risques fous, et tant mieux car ça paie.

C’est ainsi qu’on pourrait résumer ce qu’il nous reste d’adoration à la fin de la séance, on a vu un film plein de bonnes intentions, assumant parfaitement ses références, s’amusant à les détourner plutôt que les reproduire bêtement, jouant plus sur l’ambiance et sur ses acteurs que sur un vrai fil narratif. Alors certes, tout n’est pas parfait, loin de là, mais le film ose beaucoup de choses, et fait mouche la plupart du temps, c’est surement pour ça qu’on est fasciné par ce qu’on voit, un trip violent et minéral d’une beauté incroyable, une œuvre sans concession qui en laissera plus d’un sur le carreau. Mais bon sang, quel film!